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![]() Le temps s'est arrêté à la Plantation Lathefield dont les champs de cannes envahissaient la Baie d'Hodges. Escale dans les eaux tièdes des Antilles.
Voisine de la Guadeloupe, Antigua-et-Barbuda est l'un des plus petits pays du monde. Dans cette île intime chaque escale est une découverte. De jolies plages et un certain art de vivre exotique et britannique.
Lord Nelson était Anglais, amiral et persévérant. Dans la baie de Calvi, il a perdu l’œil droit ; à Tenerife, le bras droit et à Trafalguar, la vie. En même temps, il infligeait à la Flotte française des déroutes navales désagréables. Sans doute parce qu’il ne s’est vraiment rien passé de mémorable à Antigua, on cultive avec soin le souvenir de l’intrépide marin. Jeune capitaine, il séjourna trois ans à English Harbour, un remarquable abri naturel. Commandant la Boreas, il avait baptisé cet endroit si romantique « an infernal hole » (un trou d’enfer). On a donc restauré soigneusement la petite garnison maritime qui compte un fort, une maison à cabestan, un quartier pour les officiers, des magasins et la Maison de L’Amiral. Cette dernière qui rutile de peinture fraîche abrite un gentil musée qui expose toute sorte de souvenirs du grand marin. Pièce rare : le lit d’Horatio Nelson offert par Lady Campbell. Mais les historiens qui ne sont pas toujours des gens de confiance font remarquer que le style Régence du mobilier est bien postérieur à la mort de l’illustre amiral.
Chaque année, en avril, tous les voiliers qui participent à la prestigieuse Antigua Sailing Week – les plus beaux du monde – viennent mouiller dans cette petite mer intérieure calme comme le lac de Genève. English Harbour est un lieu inspiré par la mer. On prétend que Christophe Colomb débarqua ici en 1493 et donna à l’île le nom d’une église de Séville, Santa Maria la Antigua. Tous les jours, William The Balde (le Chauve) prenait un café à la terrasse de l’incontournable Admiral’s Inn. William était le cinquième souverain de Redonda, un îlot désert, propriété du vent et des oiseaux. Cette dynastie autoproclamée qui remonte à 1865 est une expression inédite de la malice britannique. Un jour qu’il navigue au large de Redonda, un Anglais fortuné, Matthew Dowdy Shiell, décide d’offrir ce royaume virtuel à son fils, baptisé aussitôt Philippe 1er. A la mort du roi, on a pris l’habitude de transmettre la couronne à un écrivain. Dans le civil, William The Balde s’appellait Bob Williamson. Il s’était fait une certaine réputation en écrivant des articles pleins de bon sens dans la presse britannique. Le roi était venu d’Europe il y a une vingtaine d’années à bord de son vaisseau amiral, le Saint Peter, réplique tape-à-l’oeil d’un Baltic Trader de 1780, remis en état dans les chantiers de Saint Petersbourg. Il a raconté sa traversée mémorable à la tête d’un équipage russe incontrôlable et continuellement imbibé de vodka dans un récit qui s’intitulait : « La façon la plus ridicule d’aller aux Caraïbes ». Chaque escale dans cette île est une échappée joyeuse. Personne ne peut oublier d’aller au sommet de la colline de Shirley Heights qui offre sans doute le plus beau panorama de l’île : une succession de mamelons coiffés de moulins sans bras et de baies échancrées ponctuées par des maisonnettes jaunes et mauves. Le soir, aux abords des anciens quartiers du Royal Artillery, les accents des steel bands orchestrent un coucher de soleil divin et les premiers clignotements de la ville. Dimanche au temple presbytérien de Liberta. Plusieurs centaines d’églises peuplent l’île : des pâtisseries roses, des dômes vert-amande, des bâtisses étrangement médiévales flanquées de vitraux clinquants. De joyeuses mélopées s’échappent du temple et emplissent la campagne. « Le noir a - si l’on permet le mot - une drôlerie, un sentiment du pittoresque, une naïveté, une vivacité dans la passion qui le rendent souvent fort intéressant » expliquait en 1858 l’explorateur Anthony Trollope au retour d’un voyage aux Indes Occidentales (les Antilles Britanniques). Dans l’assistance, toutes les dames portent un chapeau qui semble tout droit sorti de la garde-robe de la reine d’Angleterre et reconnaissable à ce petit rien de mauvais goût indéfinissable. Mais rassemblée ici, dans la torpeur d’une île tropicale, cette collection de couleurs criardes compose un spectacle d’une gaieté grisante. On chante donc avec bonheur sous les voûtes blanches du temple. Puis, le pasteur entreprend un sermon interminable avec les accents pathétiques de Martin Luther King. A grand renfort de citations de l’Ancien Testament, il promet une vallée de larmes pour tous les dérapages inavouables de la vie quotidienne - les coiffes tressaillent, les petites robes blanches s’agitent - et le bonheur éternel pour toutes les bonnes actions. Un vent d’air frais emplit le temple. Puis tout ce petit monde sanctifié - les chapeaux, les soies légères et les mousselines furtives - s’évanouit dans la nature qui devient brutalement déserte et silencieuse, renvoyant à peine le bruissement des palmes et les soupirs de l’océan. A Antigua, comme à Londres, le jour du Seigneur est sacré. Comme l’heure du thé ou une partie de criket . Visite à John Fuller, avocat à la Cour. Il habite au nord de l’île une grande case en bois cernée par des flamboyants. Une cascade de bougainvillées envahit la varangue ciselée. Habitué aux grands secrets, John est discret comme un banquier suisse. Il est vrai qu’à Antigua les fortunes passent et reviennent, les pactoles naissent et s’évaporent. Les hommes de loi sont là pour donner à toutes ces errances obscures les formes juridiques de la bienséance. Dans un autre registre, il a plaidé hier la folie pour un meurtre passionnel. Sans conviction : « a man who killed his wife is not really crazy » (un homme qui a tué sa femme n’est pas vraiment fou) explique-t-il. Mais l’avocat a des occupations plus importantes : la préservation du patrimoine de son île adoptive. Ainsi organise-t-il régulièrement des manifestations pour tenter de sauver les jolies cases colorées du centre de Saint John, promises à l’appétit des bétonneurs. Ailleurs, il parcourt sans relâche les chantiers de construction, se faufile au milieu des pelleteuses pour arracher à la terre les reliques laissées par les premiers habitants de l’île, les Siboney et les Arawaks. Dans son bureau, John entasse un beau désordre de gracieuses statuettes, d’os sculptés, de poteries et de bijoux. Ainsi, il se passe toujours quelque chose pour que cette île qui respire le bonheur ne sombre pas dans l’ennui. On finirait même par oublier qu’elle est bordée par trois cent soixante cinq plages de sable blanc et que son souverain s’appelle Elisabeth II. ![]() Depuis Shirley Heights, on survole le bassin transparent du port d'Antigua et, plus loin, Montserrat et la Guadeloupe. ![]() La Maison de Nelson dans le port d'English Harbour. L'amiral anglais prétendait que c'était "un trou d'enfer". ![]() Le soir, aux abords des anciens quartiers du Royal Artillery, les accents des steel bands orchestrent un coucher de soleil divin. ![]() Buste polychrome de l'Amiral Nelson situé devant la maison qu'il occupait à English Harbour. ![]() La côte nord est de l'île d'Antigua cache des demeures secrètes et répand le parfum des fleurs. ![]() L'Hôtel Copper & Lumber Store aménagé dans d'anciens magasin du chantier naval d'English Harbour. ![]() Toutes les marines du monde ont mis sur la proue de leurs navires des jolies femmes dénudées. ![]() Les anciens moulins à sucre de la plantation Betty's Hope. La canne à sucre était la principale richesse des îles. ![]() Le lit à Baldaquin prétendu être celui où coucha Nelson pendant son séjour à English Harbour. ![]() Bob Williamson, un des plus pittoresques rois de Redonda couronné sous le nom de Guillaume le Chauve. A sa mort, l'écrivain espagnol Javier Marías Franco lui a succédé sous le nom de Xavier 1er. ![]() Du centre-ville de St John's, on exporte le sucre, le rhum et coton, ainsi que des produits d'artisanat. ![]() ![]() Les ruines envahies par la végétation de l'ancienne usine à sucre de la plantation Betty's Hope. ![]() Le Galley Bay resort situé face à la mer à Guard Point. On prétend qu'Antigua est bordée de 365 plages. ![]() ![]() Les maisons de St John's : des planches maintes fois repeintes et des toits en toles ondulées envahies par la rouille. ![]() A Antigua, comme à Londres, le jour du Seigneur est sacré. Comme l’heure du thé ou une partie de criket. ![]() Les cases colorées du centre de St John's trop souvent promises à l’appétit des bétonneurs. ![]() Saint John's, capitale d'Antigua peine à devenir une grande ville. Tant mieux. ![]() Ce canon du Fort James tourné vers la mer n'enverra plus un seul boulet. ![]() Saint John’s est le centre administratif d’Antigua-et-Barbuda depuis la colonisation du pays en 1632 et après l'indépendance. ![]() English Harbour. Ce bassin circulaire aux eaux cristallines est le mieux protégé de l'île. ![]() Bâti par les Britanniques, le Fort James, situé sur les hauteurs de St John's, avait une puissance de feu redoutable. ![]() Les mangroves de l'île sont le royaume des aigrettes et d'une intense vie sauvage. ![]() Le centre d'exposition de Dow's Hill propose une gentille histoire d'Antigua et Barbuda. |
J'y vais
Vols Paris-Antigua à partir de 770€ AR avec Go-Voyages, www.govoyages.com. On peut aussi se rendre à Antigua à partir de Pointe-à-Pitre ou de Fort de France par la compagnie Liat, www.liatairline.com. Attention, une taxe d'aéroport est perçue au retour (20 USD/15€)
Coup de cœur
Deux hôtels de charmes à English Harbour : The Copper & Lumber Store Hotel, un ancien magasin de cuivre et de bois de charpente du XVIIIe siècle agréablement restauré (à partir de 100€. la nuit), www.copperandlumberhotel.com ; The Admiral's Inn, une quinzaine de chambres - vieux parquets, lit à baldaquin - à partir de 100€ la nuit, http://admiralsantigua.com
Coup de folie
Heritage Quay à St John's est la zone hors taxe la plus développée de la zone Caraïbe. On y trouve toutes les grandes marques, cigarettes, tabac, alcool, montres, bijoux, émeraudes de Colombie etc... Attention à la douane française!
Les quatre vérités
✔ Sur la mer. Le soleil est d'une rare violence même par temps couvert. Multiplier les protections (chapeau, crème solaire etc.).
✔ En ville. Les magasins ferment très tôt (16 heures). Du samedi midi au lundi matin, Saint John's est totalement désert. Les mêmes précautions que partout ailleurs. Ne pas tenter le diable! ✔ Saisons. Meilleure saison de décembre à mai (température moyenne 26°). Plus chauds, juin-juillet-août sont également très agréables car des alizés constants rafraîchissent la température. Eviter fin septembre-début octobre (période cyclonique) et novembre (mois pluvieux). ✔ Voiture. Même pour une location d'une journée, vous devrez payer un permis de conduire local. Coût : US$ 20 (5,5€). Inutile et dissuasif. Prudence sur les routes (étroites) où le code de la route est souvent ignoré. Budget
Les prix sont affichés en dollar Est-Caraïbe (EC$) ou en dollar américain (US$). Attention à la confusion, les prix sont affichés dans l'une ou l'autre monnaie.
Une chambre double dans un bon hôtel: 70€ par personne sur la base d'une double + taxes locales 18,6%; Un repas dans un petit restaurant: 10-15€; Un café express: 3€; Une course en taxi: de 10 à 20€ (maximum); Location de voiture: à partir de 15€/jour hors assurances Visite d'une journée à Barbuda: 61€ par personne (A/R sur ferry de BarbudaExpress + déjeuner de langouste+ tour de l'île). Informations
OFFICE DU TOURISME D'ANTIGUA ET BARBUDA, 43, avenue de Friedland, 75008 Paris, tél. 01 53 75 15 71, www.antigua-barbuda.fr
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